Donnez un coup d’accélérateur à votre machine à talents
La « guerre des talents » est perpétuellement sur l’agenda de tout président du directoire. La plupart d’entre eux réalisent qu’il leur faut personnellement prendre un rôle actif pour trouver, développer et affecter les meilleurs meneurs aux postes clés de leur entreprise.
Le récent recul de l’économie mondiale met ce défi pour les talents sous une perspective nouvelle. Les bons meneurs sont plus importants que jamais en temps de crise, et s’assurer d’en trouver suffisamment pour les postes auxquels ils feront le plus de différence demeure une priorité vitale. Développer une entreprise dans laquelle il y a beaucoup de talents est par definition un défi de plusieurs années. Cependant, en suivant les trois étapes ci-dessous, vous aurez un impact immédiat sur le nombre de talents qui vous sont disponibles; vous créerez également les fondations pour des changements à plus long terme.
Quantifiez le déficit de meneurs.
Un déficit de meneurs est une disparité, présente ou future, entre l’offre et la demande de talents. Pour bien comprendre l’offre et la demande de meneurs, le mieux est d’analyser méticuleusement la situation actuelle et de faire des projections prudentes des changements qui surviendront dans les mois et les années à venir. Pour ce qui est de l’offre, commencez par la base. Combien de meneurs avez-vous? Quels sont vos taux de recrutement et de promotion? Quel est le niveau de departs des d’effectifs (voulus ou non) et de departs en retraite? Quels facteurs affecteront le recrutement, les promotions et les departs d’effectifs dans le futur proche?
Vous pouvez faire cette analyse par région, par division, par fonction ou par capacité essentielle. Le résultat vous donne une série de données importantes qui vous permettent de créer ou de valider une prévision de besoins en talents. Il est tout aussi important d’analyser le déficit de meneurs de cette façon pour vous aider à identifier les facteurs limitants qui requièrent votre attention immédiate. Pour ce qui est de la demande, commencez par une analyse tout aussi fondamentale. Quel sera l’état des affaires dans un an? Dans trois ans? Dans cinq ans? De combine de meneurs aurez-vous besoin dans chaque division, région et fonction? Quelles compétences ces personnes devront-elles avoir? Faire correspondre les prévisions de demande et d’offre montre, en termes généraux, où les besoins en talents se feront probablement le plus sentir. Cela aide aussi à se rendre compte des effets du recul économique.
Certaines divisions et regions continueront probablement à grandir au cours des prochaines années; alors que d’autres stagneront, et en fait, pourraient mettre être des exportatrices de talents vers certaines parties de l’entreprise qui en ont besoin. Une analyse détaillée de la demande vous permettra de voir les deux cotés de ce « livre de comptes des talents », et vous aidera à éviter le piège qui consiste à faire des suppositions pour l’entreprise toute entière, en ce qui concerne les besoins en talents et les endroits où se les procurer.
Toute analyse de la demande de talents de meneurs par rapport à l’offre doit être basée sur une bonne compréhension de la stratégie de l’entreprise. Essayer d’évaluer vos besoins en talents sans stratégie bien définie, et sans que l’entreprise soit bien alignée sur cette stratégie, serait comme monter un groupe sans savoir quel type de musique vous voulez jouer. L’étape importante suivante est l’analyse des besoins et des disponibilités de meneurs en fonction de la situation spécifique de l’entreprise. Par exemple, une compagnie minière sud-africaine devait améliorer à la fois sa performance opérationnelle et son niveau de sécurité, et avait désespérément besoin de gestionnaires de mines, d’ingénieurs et d’experts afin de faciliter ce redressement. Elle s’était aussi engagée à embaucher 40% de ses gestionnaires pour l’Afrique du Sud parmi les Sud-Africains désavantagés. Afin d’accomplir tout cela efficacement, la compagnie a d’abord défini ses postes de meneurs de façon à comprendre les compétences requises par chacun. Elle a ensuite évalué le bassin de meneurs potentiels et utilisé un modèle montrant les possibilités d’avancement de ces meneurs au sein de la compagnie. Il en a résulté une photo claire des capacités de meneurs nécessitées et des possibles remplaçants pour chaque poste essentiel. La troisième étape est concentrée sur la qualité des processus liés aux talents au sein de la compagnie. Toute analyse détaillée du déficit de meneurs demande que la compagnie assemble une grande quantité de données.
Les gestionnaires ont besoin d’évaluer le nombre de postes pourvus par des recrutements externes, le taux de rétention de ces recrutements externes, les taux de promotion par poste et par niveau, les notes de performances par service et par poste, et ainsi de suite. L’analyse de ces données révèle énormément d’information sur les forces et faiblesses du processus que suit la compagnie pour se fournir des meneurs. Les gestionnaires demandent souvent si les efforts de recrutement fournissent des gens qui ont des taux de promotion moyens ou supérieurs à la moyenne; ou quel est le service qui a le plus grand nombre de mauvais employés. Les meilleures analyses soulignent une variété de déficits (par fonction, niveau et année); y-compris les déficits de compétences, de performance (le nombre de bons, moyens et mauvais employés), de postes à pourvoir et de recrutement (par exemple, recrutons nous suffisamment de gestionnaires seniors et intermédiaires?).
Tirez pleinement avantage des talents disponibles.
Le nombre de présidents qui ont du mal à répondre à la question suivante est surprenant : « Combien de postes cruciaux sont occupés par des gestionnaires que vous considérez comme étant parmi les meilleurs talents? ». Ceux qui peuvent répondre révèlent souvent une contradiction alarmante. La plupart de leurs postes cruciaux sont occupés par des employés moyens, et certains par des individus médiocres, alors que les meilleurs employés sont souvent affectés à des postes routiniers. Dans une entreprise internationale de technologie par exemple, plus de 40% des bons employés identifiés occupaient des postes jugés non-essentiels, et moins de 40% des postes cruciaux étaient occupés par de bons employés. Affecter les meilleurs employés aux postes essentiels comprend trois étapes. La première est d’identifier les postes eux-mêmes.
Quel poste a le plus d’impact sur la performance d’affaire en fonction du calibre de la personne qui l’occupe? Dans quels postes un excellent employé aura-t-il plus d’impact qu’un employé moyen? Ces métiers sont souvent en première ligne, et ils peuvent se trouver n’importe où dans la compagnie, en function des priorités stratégiques de l’entreprise. Bien sur, la nature des postes cruciaux d’une organisation peut changer lorsque l’économie change ou que de nouvelles menaces concurrentielles émergent. La deuxième étape pour affecter les meilleurs employés aux postes essentiels est un système réaliste et rigoureux d’évaluation des employés. Quel a été le niveau de performance de chaque employé dans le passé? Quel est leur potentiel? Les compagnies ont besoin de gens qui ont des compétences de meneurs et de gestion (par ex. la capacité de gérer un budget), ainsi que des compétences techniques. L’individu qui est très compétent dans ces trois categories est rare, mais la compagnie doit savoir qui possède laquelle ou lesquelles de ces compétences. Elle doit également savoir si les employés travaillent en accord avec les valeurs et la culture de l’entreprise. À la fin de sa période chez General Electric, Jack Welch a déclaré qu’il n’était pas suffisant que les gestionnaires de la compagnie atteignent leurs objectifs; ils devaient aussi vivre selon les valeurs de GE.
La clé est d’avoir un processus de gestion de la performance efficace. La plupart des compagnies ont les éléments de la gestion de la performance, et certaines parties du processus sont parfois parmi les meilleures. Mais aucun système de gestion de la performance ne peut fonctionner à moins qu’il ne comporte de vraies conséquences. Si des différences dans l’évaluation engendrent réellement des differences dans ce qui en ressort, par exemple des différences d’opportunité de carrière, de mentor, de formation, de salaire, d’efforts de rétention, et ainsi de suite, alors le supérieur direct (et en fait, tout le monde) prendra ces évaluations au sérieux. Les gestionnaires conduiront bien plus souvent ces revues de performances en personne, à temps et en respectant les standards. Par contre, si elles sont sans conséquence, les gestionnaires considèreront ces revues comme de la simple paperasserie. La troisième étape : affecter les bonnes personnes aux bons postes. Trop souvent, les entreprises ne savent pas qui sont leurs meilleurs employés. Elles n’ont pas non plus affecté ces individus aux postes où ils auront le plus grand impact. De telles mauvaises affectations peuvent estropier une entreprise.
Les compagnies doivent évaluer la performance et le potentiel des employés, et déterminer s’ils vont bien, d’un point de vue culturel, avec les rôles clés Une conséquence intéressante de se concentrer sur les affectations est que cela encourage souvent le président et les équipes de haute direction à prendre plus de risque sur les étoiles montantes, avec des promotions plus tôt et des tâches qui leur permettent d’apprendre. Les entreprises qui se concentrent sur les affectations tendent aussi à fournir plus de formation par les directeurs séniors et de meilleurs mentors. Dès lors que l’analyse révèle un manque de successeurs à court terme, la direction peut mettre sur pied des plans de développement accélérés et transférer les employés qui ont prouvé leurs capacités de formateurs à des rôles clés pour assurer que l’entreprise ne cale pas à cause d’un manque de meneurs.
Réduire la demande pour les talents.
La réponse la plus courante à un déficit de meneurs est d’augmenter les efforts de recrutement, en créant des liens plus étroits avec les universités et les autres sources de talents. Une compagnie peut aussi faire immédiatement l’effort de s’occuper des déficits qui ne peuvent être comblés en interne, comme par exemple, un poste qui est vacant depuis longtemps, ou un gestionnaire médiocre qui occupe un poste crucial, sans successeur évident. Quelques efforts de recrutement hautement visibles signalent l’engagement de l’entreprise à améliorer l’approvisionnement en talents. Toutes ces mesures sont essentielles pour combler le déficit à long terme. Cependant, en redessinant une organisation et ses opérations de façon à réduire le besoin en meneurs hautement qualifiés et en experts techniques, les gestionnaires peuvent réduire le déficit, parfois rapidement. Les deux méthodes les plus efficaces pour réduire la demande sont de réduire la complexité organisationnelle et de reconcevoir les postes de sorte qu’ils utilisent les compétences des gestionnaires plus efficacement. De telles mesures non seulement réduisent la demande en talents, mais elles aident aussi la compagnie à accroitre sa profitabilité.
Ouvrir le « robinet à meneurs ».
Les entreprises qui suivent les étapes décrites dans cet article voient habituellement un impact positif sur leur déficit de meneurs dans les six à dix-huit mois. Un ralentissement économique fournit une opportunité unique pour combler ce déficit, car les meneurs compétents et expérimentés changent souvent d’emploi lorsque leur compagnie ou leur industrie est en difficulté. De plus, combler le déficit augmente la qualité du leadership de l’entreprise. Ces étapes ne solutionneront pas seules le problème de la disponibilité des meneurs. La haute direction doit aussi poursuivre des mesures de long terme, telles que cultivar un bassin de nouveaux talents, et faire de leur entreprise le type d’endroit où les gens veulent travailler et où ils souhaitent faire de leur mieux. Mais les mesures de court terme ont un effet important. Le diagnostique luimême révèle des problèmes sur lesquels vous devez vous pencher à long terme. Et toutes les étapes décrites plus haut envoient le message clair dans l’entreprise que les choses sont en train de changer. Elles aident à créer un certain engagement à résoudre le problème de déficit de meneurs sur une longue durée. Il est vrai que bien que la plupart des compagnies comprennent l’importance de se fournir des meneurs, elles ont souvent du mal à trouver des façons pratiques de s’attaquer au problème. Mais il faut noter que le simple fait de le faire est souvent libérateur : subitement, une entreprise s’occupe d’une des tâches les plus importantes dans l’environnement d’aujourd’hui. Avec un plan de talent qui est assorti à son plan d’affaire, la compagnie a de bien plus grandes chances de succès.
Avez-vous un déficit de meneurs? Posez-vous les 10 questions suivantes
- Pouvez-vous quantifier votre capacité à vous approvisionner et vos besoins en meneurs, maintenant et dans l’avenir?
- Savez-vous combien de postes cruciaux sont occupés par d’excellents employés?
- Savez combien de remplaçants possibles vous avez pour chaque poste crucial?
- Quel est votre pourcentage de victoire pour les candidats qu’il vous faut absolument embaucher?
- Vos taux de rétention des meilleurs talents (et des autres) sont-ils meilleurs, identiques ou inférieurs à ceux de vos concurrents?
- Êtes-vous proche des 100% de conformité avec les standards et processus approuvés pour créer les objectifs, évaluer les performances et développer les talents?
- Pouvez-vous expliquer clairement les conséquences pour les employés reconnus comme excellents ou comme ayant un haut potentiel, en termes de différence de salaire, de développement, d’investissement en formation, d’affectation, d’accès aux hauts directeurs, de mentor, et ainsi de suite?
- Quel est le niveau de loyauté de vos employés, tel que mesuré par la réponse à la question suivante : « Recommanderiez-vous votre entreprise comme endroit où travailler à un ami ou à un membre de votre famille? »
- Vos hauts directeurs et vos divisions sont-ils des cultivateurs ou des consommateurs de talents?
- Atteignez-vous vos objectifs stratégiques, ou le leadership est-il une contrainte majeure?
Extrait avec la permission de Bain & Company. Alan Bird est un associé du bureau de Londres de Bain & Company. C’est également l’expert mondial de Bain sur l’approvisionnement en meneurs. Paul Di Paola est un associé de Bain à New York. Lori Flees est une associée du bureau de Bain à Los Angeles. Tous trois sont des membres séniors de la pratique organisationnelle de Bain. Pour lire l’article au complet, visitez www.bain.com, et tapez le titre de l’article dans la case de recherche.